Nous sommes avant-gardistes
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10/04/2014
RENCONTRE AVEC... YVON BERLAND. Président de l’Université d’Aix-Marseille (AMU).
Depuis le 1er janvier 2012, les trois universités d'Aix-Marseille ont fusionné pour donner naissance à Aix-Marseille Université (AMU). Forte de ses 72.000 étudiants dont 10.000 internationaux, de ses 7.680 agents du personnel, d'un budget de fonctionnement de 750 millions d’euros, et quelque 132 structures de recherche réparties sur cinq grands campus: l’AMU est aujourd’hui la première université de France et du monde de la francophonie.
Les enjeux imposés par cette réorganisation se sont accompagnés d’un renforcement des personnels avec de nouveaux recrutements, un enrichissement et une diversification de l’offre de formations dans les facultés, les écoles et les laboratoires.
Désormais, l’AMU se présente comme une entité territoriale ouverte à la sphère socio-économique, pour y intégrer ses étudiants au monde de l’entreprise, mais aussi, les préparer et les former aux métiers de demain.
Deux années se sont écoulées depuis l’engagement de ce process. Aujourd’hui, Yvon Berland, son président, instigateur de cette fusion depuis 2004, présente cette université unique qui entreprend sa dernière réforme - à savoir son organisation administrative et technique qui sera finalisée en septembre 2014. Rencontre.
Linda Be Diaf : La fusion des trois universités d’Aix-Marseille en une entité unique était-elle nécessaire ?
Yvon Berland : J’ai eu l’idée de la fusion en 2004 et, pour tout vous dire, peu de mes collègues pensaient que nous allions réussir. Et, ça les a bluffé !
Aujourd’hui, Lille se réorganise à son tour, Montpellier va fusionner en 2015, Bordeaux, Rennes, Clermont-Ferrand en 2016. La fusion devient un processus naturel et nous avons été parmi les premiers. Nous sommes avant-gardistes. Les étudiants, les personnels et les enseignants-chercheurs s’apercevront d’ici deux à trois ans combien on a eu raison de le faire.
L.B.D. : Comment la réorganisation a-t-elle été vécue par les personnels de l’université ?
Yvon Berland : Au début, avec beaucoup d’inquiétude. Il y a eu un énorme travail d’état des lieux et de diagnostics. Qu’est-ce que nous sommes ? Trois universités avec des fonctionnements, des positionnements et des taux d’encadrement différents. Devant les inquiétudes, je suis allé personnellement rencontrer 600 personnels, au cours de 45 réunions, à qui j’ai expliqué ce que nous allions faire et pour qu’ils me posent leurs questions.
Mon objectif dans ce processus de restructuration est clair : pas de brutalité, pas d’injonction, pas d’obligation. C’est socialement un engagement que j’avais pris et que je respecte.
La réorganisation s’est faîte avec une attention sociale qu’on a rarement pu voir. On a fait du cousu-main. Aussi, nous allons recruter 80 personnels car je me suis engagé à ce qu’il n’y ait pas de mobilité obligatoire entre Aix-en-Provence et Marseille. Tous les personnels seront positionnés pour que toute la réorganisation soit opérationnel le 1er septembre 2014.
L.B.D. : Quelles en sont les retombées aujourd’hui ?
Yvon Berland : L’AMU donne une identité exceptionnelle à l’Université ainsi qu’une reconnaissance sur le territoire où elle est devenue un interlocuteur incontournable.
En France, nous sommes désormais bien reconnus. D’ailleurs, lorsque le Ministre Marylise Lebranchu se rend à Marseille, elle vient discuter avec nous pour savoir comment nous avons procédé pour réussir la fusion. Il est rare que l’on prenne l’Université en exemple. On peut donc s’en réjouir.
Au-delà de cet exemple, la fusion donne une visibilité internationale et, en interne, permet d’installer l’interdisciplinarité qui est un des acquis. De la même manière dans la recherche, nous venons de lancer des pôles thématiques qui sont un outil développé pour que les différents secteurs communiquent ensemble. Sans la fusion, cela n’aurait pas été possible.
L.B.D. : Comment AMU contribue-t-elle au développement de la recherche française et à ses projets collaboratifs ?
Yvon Berland : Dans le cadre du grand emprunt, huit sites ont été labellisés « site d'excellence » - dont l'AMU - par un jury international en 2012. Ce label s’accompagne de 750 millions d'euros en capital qui nous permettent de financer de gros projets de recherche, de faire venir des doctorants, de jeunes chercheurs étrangers, des chercheurs confirmés.
Tout le monde est en train de bénéficier de cet élan qui est un apport considérable pour l’activité de recherche dans les cinq grands thèmes : énergie, santé et sciences du vivant, sciences et technologies avancées, société, environnement. Cet ensemble donne un dynamisme considérable dont on tirera bientôt, tous les bénéfices.
Le jury a examiné les capacités à réaliser notre projet. Sans cette fusion, nous n'aurions pas été retenus et nous n’aurions pas eu le label "site d'excellence".
Lors de son contrôle, le jury a pris en considération la gouvernance de l’établissement et le consortium porté par AMU : le CNRS, l’Inserm, le CEA, l’IRD, Centrale Marseille, Sciences Po, et l’AP-HM.
Il nous a reconnu comme site d’excellence et j'espère qu’en 2016, il nous maintiendra avec ces financements de manière pérenne car c’est un label excessivement valorisant.
L.B.D. : Quels sont vos projets pour relier le monde universitaire au monde socio-économique ?
Nous avons signé de nombreux partenariats avec de multiples grandes entreprises : Eurocopter, la Caisse d’Epargne, la Caisse des Dépôts, et j’en oublie bien d’autres. C’est important pour nous.
Notre objectif est de mieux faire connaître aux entreprises les compétences de nos étudiants d’IUT, de Licence, de Master et de Doctorat. Lorsque nous discutons avec la CMA-CGM par exemple qui nous dit avoir besoin de juristes, d’économistes... Alors, on imagine le type de formations qu’il va falloir créer au regard des métiers de demain, dans le domaine des sciences humaines.
En cela, c'est vraiment un partenariat, car nous sommes-là aussi pour participer au développement du territoire. Pour cela, il faut que l'université s’ouvre et communique avec le monde socio-économique.
L.B.D. : Vous souhaitez donc faire des étudiants d’AMU le premier vivier d’employabilité pour les entreprises de la région ?
Yvon Berland : Tout à fait, c'est exactement ça. Nous formons nos étudiants pour une embauche dans le monde socio-économique. L’Université doit comprendre qu’elle n’est pas là pour former uniquement des enseignants et des enseignants-chercheurs.
D’ailleurs, il faut aussi montrer au monde de l’entreprise qu’un doctorant est quelqu’un qui, du fait de son expérience, de sa recherche, de sa capacité à développer un esprit d’initiative et critique, est très intéressant pour une entreprise. Un étudiant qui n’est pas formaté et possède la possibilité d’apporter une réflexion à l’entreprise.
C'est d’ailleurs pourquoi, dans la loi de l’Enseignement et de la Recherche de juillet 2013, nous avons beaucoup insisté pour que le grade de « Docteur » soit reconnu, y compris dans la fonction publique.
L.B.D. : Le programme Plan Campus, initié en 2008, a été relancé le 03 février 2014 à Lille avec un nouveau protocole d’accords. AMU est-elle concernée par ce renouvellement ?
Yvon Berland : Nous sommes le 2e site universitaire concerné. La signature devrait intervenir au mois d’avril.
En 2008, le ministère nous a octroyé un capital de 500 millions d’euros dans le cadre de l’opération Plan Campus. Dans les faits, nous n’avons pas l’autorisation d’utiliser ces 500 millions d’euros mais uniquement les intérêts générés par leurs placements. Ils sont utilisés pour financer les opérations de réhabilitation et de maintenance des facultés.
Si tout va bien, les travaux de rénovation du campus Schuman à Aix-en-Provence commenceront à la fin de l’année 2014 où nous réhabiliterons entièrement la faculté de Lettres et ses abords. Nous rénoverons également la faculté de Droit. La fin des travaux est prévue pour 2017 et, tel que je l’imagine, le site sera exceptionnel.
Entretien réalisé par Linda Be Diaf
10/04/2014 06:28
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Article publié dans le Supplément Ecoles et Formations du quotidien régional "La Marseillaise" - 15 mars 2014